Déclaration de guerre


Nozay, le 1er août 1914 …..le ciel est au bleu !

 

Il fait si beau, si chaud, en ce début d'après-midi du 1er août 1914. Nozay somnole. Les enfants sont en vacances. Dans les champs, les blés sont murs. Le temps semble suspendu. Seul, le « tchou-tchou » du train entrant en gare trouble le silence ambiant. Le soleil brille et pourtant les nuages noirs envahissent les esprits de tous.

« Tout va si vite ! » Depuis le funeste assassinat de l'archiduc d'Autriche, là-bas, si loin de Nozay, à Sarajévo, le 28 juin, les bruits de bottes s'emplifient. Les prières pour le maintien de la paix s'entendent dans les églises.

 

Il est 13 heures

Jean-Marie Boucher et Elie Tourillon boivent un dernier verre à l'ombre de la tonnelle du café de la place. Ils sont instituteurs tous les deux et le premier, plus âgé, donne à son compagnon quelques conseils pour la rentrée prochaine. Le ton est grave et la conversation s'arrête longuement sur l'assassinat de Jean Jaurés, il y a moins de 24 heures.


Il est 14 heures

Une lumière éclatante se faufile à travers les persiennes. La maison Deluen , dans la Grand-Rue dort sous la chaleur de l'été. Jean, jeune abbé, passe quelques jours chez ses parents. La famille Deluen est une très vieille famille nozéenne qui donne, de générations en générations, des clercs et des recteurs à la région. Jean perpétue la tradition. Il est encore novice chez les Eudistes mais dans quelques années, il prononcera ses vœux perpétuels et sera ordonné prêtre. C'est à cela qu'il pense en cet été 1914 , en souriant!

 

Il est 15 heures

Au fond de la carrière, sous l'effet de la poudre noire, un lourd bloc de pierre bleue se détache du front de taille. Tout près, Eugène Agu, du Vieux-Bourg, peine, à grands coups de manivelles, à remonter par le treuil, un lourd palis. Stanislas Lemasson de la Villatte, son compagnon de travail, attend. Tous les deux, ils porteront, ensuite, ce palis vers la grande scie circulaire pour le débiter.

 

Il est 16 heures

En surplomb du ruisseau de Sauzignac, les faucheurs sont à l'oeuvre depuis le levé du soleil. En ce milieu d'après-midi, on finit de transporter les gerbes de blé. François Deniel et Jean Menuet, deux amis du même village proche, le Pont-Frémont,en cadence, envoient, à bout de bras, les dernières gerbes dans la charrette. La musette avec le cidre frais, les attend sous un pommier proche.

 

Il est 16h30

La demi-heure sonne à l'horloge de la mairie. A l'étage, une fenêtre entrouverte laisse passer un rideau. C'est celui du bureau du maire, Alexis Létourneau. Celui-ci, attend, assis à sa table. La porte s'ouvre et Jean-Marie Le Gal, le secrétaire de mairie lui tend un « petit bleu », un télégramme.

« mademoiselle Guyard, la receveuse des postes, vient de le recevoir » dit-il!

 

Ce télégramme ne contient que peu de mots :

« Le 1er août 1914,le gouvernement français décrête la mobilisation générale pour tous les hommes appartenant aux classes 1887 à 1910 »

 

C'est tout ! Et il n'y aura pas de convocation individuelle, chacun devant se référer à son livret militaire !

 

 Il est 17 heures

Le maire descend la rue de l'Eglise. Dans celle-ci, l'attendent le curé Forget et ses deux vicaires. En voyant le papier bleu. Ils comprennent et se dirigent vers les cloches. Ils sonnent le tocsin !

 

Dans les champs, dans les carrières, dans les boutiques ou au fond des maisons, tous lèvent la tête !

 

« ça y est , c'est la guerre ! »

 

A l'encontre, des messages véhiculés depuis, il n'y pas d'enthousiasme pour cette guerre, pas d'esprit de revanche non-plus, malgré l'annexion de l'Alsace-Lorraine mais seulement le sentiment qu'il faille défendre la patrie et la république !  La guerre s'impose mais elle sera ….courte ! Tout le monde ou presque en est convaincu !

Le 2 août, l'Allemagne envahit le Luxembourg. Le 3 août, la Belgique et le nord de la France sont conquis et l'Allemagne nous déclare la guerre .

 

900 Nozéens sont mobilisés  sur 4 200 habitants .

 

François Deniel du Pont-Frémont est tué le 22 août 1914 à Maissin. Il avait 23 ans. C'est l'un des premiers nozéens morts pour la France.

Jean-Marie Menuet du Pont-Frémont est tué le 25 octobre 1914, dans les tranchées de Poissy, il avait 25 ans.

Jean-Marie Boucher est décédé le 18 décembre 1814 à Carcassonne. Il avait 31 ans

Elie Tourillon est décédé le 18 octobre 1917 à Bar le duc ; il avait 23 ans.

Stanislas Lemasson de la Villatte est décédé le 30 novembre 1915 à l'âge de 20 ans.

Eugène Agu du Vieux-Bourg est décédé le 4 octobre 1914 à la Boisselle. Il avait 32 ans.

Jean Deluen est mort le 5 juillet 1917 dans les tranchées, tué par un éclat d'obus. Il avait 22 ans.

 

176 Nozéens ne reviendront pas chez eux 

 

 L'ensemble des personnes citées ci-dessus a réellement existé,les soldats tués à la guerre également. Le récit n'est qu'une approche de cette journée du 1er août 1914, une histoire dans l'Histoire.

 

 

Association Asphan : 28 avril 2014


SOURCE : Cette page a été déjà été diffusée dans le "Noz'Infos" de l'automne 2014.

 

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